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Le sanctuaire de la feinte Trini-thé
2 décembre 2010

Chef d'oeuvre

Quand j'étais en école d'art, une de mes professeure nous avait demandé d'amener une reproduction de ce que nous considérions comme un vrai chef d'oeuvre, une vraie Œuvre d'Art dans toute sa force et sa splendeur, un de ceux qui vous marque toute votre vie,qui vous met des aiguilles et des papillons dans le ventre, rampe sous votre peau comme un parasite et s'installe dans votre cœur pour vous bouffer d'amour lentement de l'intérieur.

Je ne vous parlerai pas de celui des autres ,mais du mien.
C'est une belle histoire d'amour, depuis que j'ai 4 ans.

vague
"La Vague" de Hokusai

Bon, vous me direz, elle est connue celle là.
Certes, mais je n'y peux rien. Quand je la vois, je me sens toute petite, comme si la vague s'apprêtait à me submerger moi.
Mais c'est l'émotion qui me noie. Les couleurs sont parfaites, l'énergie palpable, la forme est sublime, toute en courbe et en arrêtes acérées, c'est l'eau dans toute sa splendeur , sa force et ses contradictions . 

Le tableau est d'un équilibre hallucinant. On pourrait le croire déséquilibré, avec cette immense vague occupant toute la parte gauche, mais Hokusai a parfaitement laissé la place au vide, justement.
On ressent l'aspiration de la vague qui se lève, on la voit un instant auparavant se former lentement, occuper tout le tableau,  j'ai presque l'impression de ressentir  cette sensation si particulière quand on est à la mer et que  l'eau  se retire doucement, presque en caresse, avant de revenir rouler violemment sur nous en petite vague rageuse.
Voilà, c'est ça que je ressent, ce vide, cette aspiration vers l'image, le souffle coupé, en suspens, le cou tendu par l'appréhension.

Et les moines ? J'ai mis des années à remarquer les moines dans leurs barques, tant la vague me fascinait.
Les moines, c'est le vide.
Les moines ne sont là que pour cette tension dramatique mais c'est eux aussi qui donnent vie à cette masse d'eau.
C'est la partie qui équilibre encore plus l'estampe.
La vague presque animale, bordée d'écume qui semble tendre une nuée de petits doigts avides face aux moines résignés a accepter leur sort. Avalés, engloutis. La vague devient un monstre.
L'animalité et la force de la nature contre la fragilité humaine.
Tout le tragique de cette scène suggéré, presque caché, bien plus étouffant que si la noyade avait été montrée .
Le temps est suspendu, le monde retiens son souffle.


En fond, le mont Fuji , en spectateur impassible, presque indifférent.

Je me sens si petite, je me sens si insignifiante.
La vague s'abat brutalement sur moi, je roule dans ses eaux, elles me caressent et me déchirent.
Ma peau brule , je ne sais plus si j'ai froid ou chaud.
Je coule. Je me noie.

Je contemple d'un oeil mort le tableau. Le sel pique encore ma gorge et rougit mes yeux.
Mon cœur bat au rythme de la mer, et quand mon regard croise le tableau , une vague immense envahit mon cœur, et me submerge.

C'est ça un Chef d' Œuvre pour moi.

 

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